L’Église catholique et la langue bretonne de 1945 à nos jours : histoire d’un divorce.
Maïna Sicard-Cras va soutenir sa thèse à Brest
Elle a déjà une belle notoriété, puisqu’elle est journaliste-présentatrice à France 3 Pays de la Loire à Nantes. Elle est également connue à la SHAB puisqu’elle a présenté une communication sur le déroulement des obsèques de Marc’harid Gourlaouen (1902-1987) à l’église de Douarnenez, lors du congrès de Carhaix en 2022.
Alors que cette militante bretonne de 85 ans avait demandé qu’elles soient célébrées « e brezhoneg penn da benn » [intégralement en breton], cela ne fut pas le cas. L’affaire déclencha une polémique et une pétition, qui ont fortement agacé le diocèse de Quimper et Léon.
Le texte de cette contribution est paru dans le tome CI (2023) des Mémoires de la Société d’histoire et d’archéologie de Bretagne, p. 601-622 et dont vous pouvez prendre connaissance en cliquant le bouton ci-dessous.
Parallèlement à son activité professionnelle, Maïna Sicard-Cras a entrepris il y a quatre ans de mener une recherche universitaire en vue d’une thèse qui a pour titre :
De Feiz ha Breiz à Feiz sans Breizh : histoire d’un divorce. L’Église catholique et la langue bretonne de 1945 à nos jours.
Feiz ha Breiz [La foi et la Bretagne], Feiz sans Breizh [La foi sans la Bretagne].
C’est le 5 novembre prochain que se déroulera sa soutenance de thèse à la Faculté Victor Segalen de Brest (UBO).
Présentation du sujet de la thèse : illusion, désillusion, allusion
L’étude débute au sortir de la Seconde Guerre mondiale, quand la langue bretonne est déjà en voie de disparition des foyers bretons. Néanmoins, plus de la moitié des clercs des paroisses du Finistère prêchent encore en langue bretonne, mais la jeunesse aspire à parler le français. La débretonnisation linguistique de la Basse-Bretagne progresse rapidement, conjointement à une déchristianisation des jeunes générations.
La langue bretonne maintient une certaine présence toujours en 1946 lors des sermons du dimanche et lors des missions et des retraites, mais les jeunes parents commencent à élever leurs enfants en français et demandent que le catéchisme leur soit dispensé dans la langue nationale. Cette première partie s’intitule « Illusion », car certains acteurs refusent d’admettre cet état de fait, et espèrent encore se retrouver dans la même situation qu’au début du XXe siècle.
Pourquoi une liturgie bretonne n’a-t-elle pas vu le jour en Bretagne après la réforme Vatican II ?
En 1963, année de promulgation de la constitution Sacrosanctum Concilium qui autorise l’usage des langues vernaculaires dans la liturgie, le breton est une langue devenue presque étrangère à la liturgie en Bretagne. Pourquoi une liturgie bretonne n’a-t-elle pas pu voir le jour en Bretagne après la réforme liturgique issue de Vatican II ? La place du breton devient une « Désillusion » pour les tenants de la langue bretonne dans l’Église, tant elle devient chaque jour de plus en plus invisible et inaudible.
Les années 1970 marquent un tournant pour la Bretagne : la jeunesse s’engage dans des cercles autres que catholiques.
Enfin, de 1984 à nos jours, le breton n’est plus qu’une simple « Allusion » dans l’Église, réduit comme une peau de chagrin. On aime entendre un cantique breton de temps en temps ou quelques mots lors des funérailles, mais la pratique religieuse en langue bretonne dans le quotidien des fidèles a quasiment disparu.
Les trois grandes raisons de cet échec
D’abord les évêques bretons ne pouvaient pas ou ne souhaitaient pas imposer une ligne directrice précise à leurs ouailles et moins encore à leurs prêtres. Puis, ils reprochaient aux bretonnants de n’être pas suffisamment unis pour la même cause. Enfin, la langue bretonne n’était, selon eux, pas ou plus pratiquée dans l’espace public.
Maïna Sicard-Cras illustre l’approche de sa thèse par un extrait d’un article tout à fait significatif, paru dans La Semaine religieuse du diocèse de Quimper et Léon le 8 juillet 1955, p.403, intitulé « L’arrivée des Touristes (sic) », qui lui paraît donner la tonalité de sa recherche.

La soutenance de thèse se déroulera le mercredi 5 novembre 2025 à 14h00 dans la salle Yves Moraud de la Faculté des Lettres et Sciences humaines Victor Segalen à l’UBO de Brest, salle B001.
La composition du jury
- Ronan Calvez, Professeur des Universités à l’Université de Bretagne Occidentale, rapporteur
- Myriam Guillevic, Maître de conférences à l’Université de Rennes II
- Eva Guillorel,Maître de conférences (HDR) dans la même Université, rapporteur
- Marie Levant, Chercheuse Marie Curie et membre de l’École française de Rome
- Yvon Tranvouez, Professeur émérite des Universités à l’Université de Bretagne Occidentale
- et Fabrice Bouthillon, Professeur des Universités dans la même Université, directeur de thèse.
