RABOT Brice
Les échanges de marchandises dans les campagnes bretonnes méridionales aux XIVe et XVe siècles
Brice Rabot a présenté une communication sur ce sujet lors du congrès de la SHAB à Loudéac en septembre 2024.
L’histoire des circulations marchandes dans les campagnes de l’Ouest à la fin du Moyen Âge reste en grande partie à établir. Cadres de vie essentiels pour les hommes – 90 % de la population vit dans ces espaces à la fin du Moyen Âge –, les campagnes sont parcourues par toutes sortes de flux, à commencer par ceux liés au prélèvement seigneurial, qui alimentent par la suite les échanges extérieurs. Les aveux, dénombrements et plus encore les comptes – à partir des années 1430 pour la Bretagne méridionale – présentent quelques éléments épars, mais réels, pour tenter de saisir les logiques et les ressorts de ces mouvements.
Dans le sillage des derniers travaux de recherche, cette communication s’attachera à présenter l’importance des marchandises dans des structures d’abord tournées vers la satisfaction des besoins locaux – dans une double logique d’autosuffisance mais aussi de proximité, les transports étant compliqués et coûteux.
Elle s’attachera également à souligner les multiples interactions entre sphères économiques et sociales, avec l’émergence et la consolidation de nouvelles géographies agraires au tournant des XIVe et XVe siècles – notamment le domaine congéable, qui apparaît dans les sources des années 1370 en Vannetais, d’autres étant attestés en Cornouaille ou dans le Trégor, qui prend très vite appui sur les circulations marchandes pour consolider ses assises territoriales.
Enfin, cette présentation permettra de mettre en exergue quelques pistes de réflexion, qui demeurent aujourd’hui à consolider par des études d’ampleur plus large que le sous-ensemble régional, comme l’écoulement des productions des tenures vers la mer ou l’arrière-pays avant d’acquitter le prélèvement seigneurial, les relations entre les paysans et les marchands, les logiques d’investissement avec la spécialisation dans certaines productions, etc.
Brice Rabot est agrégé d’histoire et chercheur associé au Centre de recherches en histoire internationale et Atlantique (CRHIA, Université de Nantes) et au Centre d’études supérieures de civilisation médiévale (CESCM, Université de Poitiers). Ses dernières investigations portent sur la reconstruction des campagnes de Bretagne méridionale à la fin du XVe siècle, les comptabilités seigneuriales ou encore les équilibres entre les communautés rurales.
Publications :
- Brice RABOT, « La gestion d’une seigneurie rurale en pays de Retz à la fin du Moyen Âge : la comptabilité de la Blanchardais », Histoire et sociétés rurales, no 45, juin 2016, p. 69-114.
- Brice RABOT, « Les comptabilités seigneuriales et les crises de la fin du Moyen Âge : l’exemple du comté de Nantes au XVe siècle », Bulletin de la Société archéologique et historique de Nantes et de Loire-Atlantique, t. 153, 2018, p. 133-152.
L’histoire rurale de la Bretagne depuis un siècle
Brice Rabot est intervenu sur ce sujet, avec Isabelle GUÉGAN, au congrès 2021 de la SHAB à Rennes.
L’histoire des campagnes bretonnes du Moyen Âge à la Révolution française fait l’objet de plusieurs paradoxes. Le premier, que les historiens n’ont pas manqué de souligner, tient à la difficulté d’appréhension des sources. Regroupant la très grande majorité des habitants à travers les siècles, les campagnes bretonnes restent malgré tout difficiles à étudier faute de sources explicites. Les archives posent en effet de nombreuses questions auxquelles il n’est pas toujours possible de répondre.
Pour autant, et c’est là un deuxième paradoxe à souligner, les campagnes bretonnes ont régulièrement été replacées au centre des attentions historiques. D’Henri Sée, avec l’étude des classes rurales, à Jean Gallet, avec l’étude des rapports entre seigneurs et paysans du XVe siècle au XVIIIe siècle, en passant par Jean-Pierre Leguay et Hervé Martin, avec l’étude de la Bretagne au tournant des XIIIe-XVe siècles, des pistes ont été esquissées pour jeter des regards plus approfondis sur les ruraux.
Depuis le début des années 2000, l’histoire rurale bretonne a connu de profondes réorientations, croisant les approches et les concepts empruntés aux autres sciences humaines. L’anthropologie historique, la géographie, l’archéologie, la sociologie ou encore le droit ont ouvert d’autres perspectives dont se sont saisis les chercheurs pour tenter de comprendre l’essence des campagnes bretonnes à travers les siècles. Mais, malgré ces efforts, les campagnes bretonnes n’ont pas fait l’objet d’une monographie régionale qui leur soit entièrement consacrée, contrairement aux régions voisines (comme l’Anjou à la fin du Moyen Âge).
Le congrès du centenaire de la SHAB offre une occasion unique de se pencher sur ces thématiques. Notre objectif n’est nullement de pallier les lacunes historiographiques. Il s’agira, plus modestement, de mettre en exergue quelques pistes de recherche qui ont récemment démontré la richesse et l’intérêt de l’histoire rurale. Ce faisant, nous établirons quelques éléments issus des investigations les plus récentes pour prouver, s’il en était besoin, que l’histoire rurale bretonne est non seulement riche en perspectives, mais aussi parfaitement adéquate pour interroger de larges pans de l’histoire bretonne, au croisement des grands champs historiques et des autres sciences humaines.
Le rapport à la terre avec les relations sociales induites, l’insertion dans les circuits d’échanges (matériels ou immatériels) pour organiser les structures rurales, le droit foncier avec les rapports de force, les stratégies et les accommodements des uns et des autres pour tirer au mieux profit des potentialités agraires sont autant de points sur lesquels nous reviendrons.
Le texte de leur contribution est paru dans le tome C (2021) des Mémoires de la Société d’histoire et d’archéologie de Bretagne, p. 411-435.