Michel Nassiet lors du congrès de la SHAB à Tréguier en 2017. Photo : DR

NASSIET Michel

Professeur émérite d’histoire moderne, Université d’Angers.

Publications :

  • Michel NASSIET, « Anne de Bretagne, a Woman of State », dans The cultural and political legacy of Anne de Bretagne. Negociating Convention in Books and Documents, Cambridge, D.S. Brewer, 2010, p. 163-175.
  •  Michel NASSIET, « Bretagne, 1498 : une femme prend le pouvoir, “Le jour d’après” : comment s’établit une nouvelle domination », Mélanges de l’École française de Rome, no 132-1, 2020, p. 25-34.
  • Michel NASSIET, Anne de Bretagne. Correspondance et itinéraire, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. ‘Mémoire commune”, 2022.

Il est intervenu au congrès 2021 de la SHAB à Rennes sur le sujet suivant :

La recherche historique sur Anne de Bretagne

L’historiographie d’Anne de Bretagne sera traitée au sens strict du terme, l’histoire du travail historique, en délaissant ce que l’on appelle le mythe, la construction d’une imagerie (ainsi le motif de la duchesse en sabot). Elle présente à la fois un paradoxe et un problème. Le paradoxe, c’est que ce personnage a été l’objet de dizaines de biographies qui se répètent, mais qu’aucune biographie récente ne conjugue érudition et compréhension du personnage. Le problème, c’est que ce sujet ne consiste pas seulement en une biographie : il est rendu complexe et par la pluralité des statuts du personnage (duchesse, puis reine, puis les deux à la fois), et par un problème d’histoire politique qui se situe au niveau du royaume, celui du projet d’autonomie du duché qui est explicité dans le traité de mariage avec Louis XII.

Ce document a été publié par Bertrand d’Argentré en 1582 dans son Histoire de Bretagne (avec d’autres sources écrites, et en recueillant aussi de précieuses sources orales). C’est un difficile problème historique que d’apprécier si ce traité était applicable, mais, pour maints historiens, et pas seulement des historiens bretons, il démontre que l’héritière du duché portait ce projet et était animée d’une volonté politique. À l’inverse, après que la monarchie l’a annihilé (en deux étapes, 1525 et 1532), des historiens ont contesté le projet de 1499 : l’un d’eux, en 1720, a contesté l’authenticité du texte, et un de nos contemporains le qualifie de « symbolique » !

Cette première opposition problématique en a engendré une autre, visant à savoir si l’épouse de Louis XII fut plus duchesse que reine, et plus bretonne que française. Des auteurs ont allégué que la reine aurait fait cause commune avec le pape, Jules II, ce que conteste, dès 1860, l’auteur de la meilleure biographie à laquelle tous les auteurs ultérieurs ont emprunté, Le Roux de Lincy. Puis, après 1870, des historiens ont reproché à la reine de favoriser la maison d’Autriche, en raison du projet de contrat du mariage de Claude avec le futur Charles Quint, ces auteurs étant moins attentifs au rapport de forces de 1501-1504 qu’à celui qui menaçait la France de leur temps.

Ces questions empêchent bien des auteurs d’accéder à une compréhension du personnage. La communication portera aussi sur les aspects culturels, auxquels ont contribué des travaux depuis le XIXe siècle jusqu’à tout récemment : sur le livre, le mécénat, les musiciens de la chapelle de la reine, et la culture matérielle autour de celle-ci. Signalons que d’importants articles ont été publiés dans les Mémoires de la SHAB : la révélation des relations de l’ambassadeur de Milan ; la datation des missives de la reine à la gouvernante de sa fille (un modèle de critique des sources) ; l’inventaire des manuscrits de la reine.

Le texte de sa contribution est paru dans le tome C (2021) des Mémoires de la Société d’histoire et d’archéologie de Bretagne, p. 211-230.