Un millénaire plus tard, le manuscrit du monastère de Locmaria Quimper va revenir en Bretagne

L’enseignant-chercheur Julien Bachelier raconte la genèse d’une belle histoire qui s’est enclenchée en 2023

  • Crédit de toutes les photos du manuscrit de Locmaria sur ce post : Christie’s images limited.
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  • Remerciements à P. Bohec et au journal Le Télégramme pour le transfert des photos.

L’histoire remonte à deux ans lors de l’organisation d’un colloque sur le monastère de Locmaria. Pour le préparer, Cyprien Henry, archiviste paléographe et conservateur du patrimoine (voir infra), a étudié la pancarte datée du second quart du XIe Siècle et retrouvé la mention d’un manuscrit conservé en Norvège, à Oslo. Il s’est rendu sur place, a retrouvé le manuscrit, y a vu des liens avec Landévennec et très certainement une attribution à Locmaria. Au début de cette année 2024, on a appris de manière officieuse que le manuscrit serait mis en vente. Il y a cinq semaines, Christie’s l’a mis officiellement en vente à Londres. C’est à ce moment-là qu’on a appris la somme : entre 300 000 et 500 000 livres britanniques.

La mobilisation des institutions et des collectivités en un temps record

Je ne me rendais pas compte du prix des manuscrits qui font l’objet d’une spéculation ces dernières années. On ignorait aussi la valeur d’un manuscrit de Bède connu par ailleurs. Très rapidement, on a compris qu’on n’avait pas la somme sur… notre compte épargne-logement. Avec un collègue de l’UBO à Quimper, Arnaud Ybert, maître de conférences en histoire de l’art et archéologie du Moyen Âge, on a d’abord misé sur le mécénat privé et contacté de grands patrons bretons et de grandes entreprises, mais ça n’a rien donné : il est vrai qu’on n’a pas trouvé le temps de les rencontrer. Le mécénat privé était donc une impasse.

Les partenaires qui se sont impliqués

Tout un collectif s’est alors mis en place en un temps record. Nos collègues de Rennes, notamment ceux de la bibliothèque des Champs libres, nous ont contactés il y a quinze jours. Là on a mutualisé tout ce qu’on avait sur le plan financier. On a contacté le ministère de la Culture, Les Champs libres, la ville et la médiathèque de Quimper, le conseil départemental du Finistère, le Centre de recherche bretonne et celtique (UBO Brest), on a essayé de trouver des fonds de cette manière. La région aussi, mais de manière indirecte par le fonds d’acquisition des ouvrages anciens. On avait réuni à peu près 335 000 €. Le conseil départemental m’a appelé quatorze minutes avant les enchères pour nous dire qu’il nous soutenait. On a essayé de trouver de l’argent jusqu’au dernier moment.

Finalement ça a marché…